« Le premier mot – le seul – que j'ai écrit sans hésitation en très gros, en traits gras, au centre de la page blanche qui faisait office de brainstorming : PRÉSENCE. Une évidence peut-être mais une évidence fragile : l'artiste associé est une personne présente. Une personne que l'on retrouve, que l'on associe au lieu, que l'on voit sur scène comme dans le hall du théâtre, que l'on croise dans la rue, à la mairie, dans son école, et que l'on a alors toutes les raisons de considérer comme un voisin, une personne qui trouble cette limite sacrée du quatrième mur, que l'on peut approcher plus près et plus longtemps que ce que le moment des saluts nous accorde comme une faveur, rendant le théâtre soudainement si facile, soudainement si possible ; mais donc, qui accepte de descendre du piédestal où la fascination – que cultive son mystère, son absence, son indifférence – la hisse souvent. Une personne qui profite de l'occasion qu'on lui donne – oui une personne qui profite des moyens, du temps – oui l'occasion et les moyens de prendre le temps – de penser ce qui pourrait se passer sur scène en fonction de qui se trouve dans la salle et de qui n'y est pas. Je trouve cela juste de privilégier la présence à la reconnaissance lorsqu'il s'agît de choisir les artistes qui seront associés à un lieu. Et c'est en cela que je ne peux qu'applaudir l'initiative de soutenir l'émergence artistique (et non pas seulement parce que c'est à moi que cette opportunité sourie) mais parce que c'est un risque. C'est un risque de lui faire confiance et d'accepter son influence, d'être poreux à ce qui la pousse à monter sur scène pour prendre la parole. »
Geoffrey Rouge-Carrassat, artiste associé à l'Université de Strasbourg 2022-2025